La relaxe de Hamé, membre du groupe de rap La Rumeur est définitivement acquise.
Ainsi en a décidé l'Assemblée plénière de la Cour de cassation.
Poursuivi en 2002 pour « diffamation à l'égard de la police nationale » par le ministre de l'intérieur pour avoir publié un texte intitulé « Insécurité sous la plume d'un barbare », évoquant les violences policières et parlant à leur sujet d'assassinats, Hamé avait été relaxé une première fois le 17 décembre 2004, relaxe confirmée en appel. La Cour de Cassation avait cassé cet arrêt le 11 juillet 2007 et renvoyé Hamé devant la Cour d'appel de Versailles, laquelle avait, une fois encore relaxé le prévenu.
L'arrêt rendu aujourd'hui est donc l'aboutissement d'une longue bataille judiciaire. Il sera abondamment commenté puisque le ministre de l'intérieur de l'époque est, comme chacun le sait, notre Président de la République.
C'est la généralité des propos en question qui ont emporté la conviction des juges. Selon l'Assemblée plénière, la diffamation n'est pas constituée car les écrits incriminés n'imputaient aucun fait précis.
Cour de cassation - Assemblée plénière - Arrêt de rejet n° 585 du 25 juin 2010 (08-86.891)
... Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 23 septembre 2008), rendu sur renvoi après cassation (chambre criminelle, 11 juillet 2007, pourvoi n° 0686.024), et les pièces de la procédure, que, sur plainte du ministre de l'intérieur, le ministère public a fait citer devant le tribunal correctionnel, du chef de diffamation publique envers une administration publique, M. M... X..., dit "Z...", membre du groupe de rap "A..." et auteur de propos publiés, sous l'intitulé "Insécurité sous la plume d'un barbare", dans le livret promotionnel destiné à accompagner la sortie du premier album du groupe, ainsi que M. E... Y..., dirigeant de la société éditrice du livret, en raison de passages mettant en cause la police nationale en ces termes :
"Les rapports du ministre de l'intérieur ne feront jamais état des centaines de nos frères abattus par les forces de police sans qu'aucun des assassins n'ait été inquiété" ;
"La justice pour les jeunes assassinés par la police disparaît sous le colosse slogan médiatique ''Touche pas à mon pote'' ;
"La réalité est que vivre aujourd'hui dans nos quartiers, c'est avoir plus de chance de vivre des situations d'abandon économique, de fragilisation psychologique, de discrimination à l'embauche, de précarité du logement, d'humiliations policières régulières" ;
que le tribunal correctionnel ayant relaxé les prévenus, appel a été interjeté par le ministère public ;
Attendu que le ministère public fait grief à l'arrêt de renvoyer les prévenus des fins de la poursuite, alors, selon le moyen, "que constitue une diffamation envers une administration publique, ne pouvant être justifiée par le caractère outrancier du propos, l'imputation faite aux forces de police de la commission, en toute impunité, de centaines de meurtres de jeunes des banlieues" ; qu'en statuant ainsi qu'elle l'a fait, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881 qu'elle a violé ;
Mais attendu qu'ayant exactement retenu que les écrits incriminés n'imputaient aucun fait précis, de nature à être, sans difficulté, l'objet d'une preuve ou d'un débat contradictoire, la cour d'appel en a déduit à bon droit que ces écrits, s'ils revêtaient un caractère injurieux, ne constituaient pas le délit de diffamation envers une administration publique ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé...
Lien :
Le site officiel La Rumeur
Sur nouvelobs.com.
L'historique de l'affaire (format pdf), rédigé par le site Acontresens.
Le site du Monde Diplomatique propose depuis le 30 septembre 2008 un récapitulatif de l'affaire.