Adepte du logiciel libre, vous vous souvenez peut-être d'une de mes publications : La fin de Microsoft ?
Petit rappel : il s'agit de la possibilité pour les consommateurs qui viennent d'acheter un ordinateur, de pouvoir obtenir le remboursement de logiciels préinstallés qu'ils ne souhaitent pas conserver.
En d'autres termes, il s'agit de ne plus payer l'environnement (Windows VISTA, XP, ou maintenant Windows 7), si vous souhaitez installer un logiciel libre (linux) comme, par exemple, ubuntu.
La question est de savoir si ces internautes peuvent bénéficier des dispositions de l'article L122-1 du Code de la consommation qui dispose :
« Il est interdit de refuser à un consommateur la vente d'un produit ou la prestation d'un service, sauf motif légitime, et de subordonner la vente d'un produit à l'achat d'une quantité imposée ou à l'achat concomitant d'un autre produit ou d'un autre service ainsi que de subordonner la prestation d'un service à celle d'un autre service ou à l'achat d'un produit ».
Le problème est que, depuis un arrêt de la CJCE du 23 avril 2009, notre article L 122-1 est d'un maniement des plus délicat
En résumé, dans cet arrêt la Cour rappelle que les gouvernements des États membres ne peuvent pas adopter des mesures nationales plus restrictives que celles définies par la directive 2005/29/CE du 11 mai 2005, même s'il s'agit d'assurer un degré de protection plus important pour les consommateurs.
Or, cette directive énumère de façon exhaustive les 31 pratiques qui, seules, sont déclarées déloyales "en toutes circonstances", et que faute d'en faire partie, la pratique déloyale concernée doit faire l'objet d'un examen au cas par cas à la lumière des articles 5 à 9 de la directive.
En l'espèce, des offres conjointes ne faisaient pas partie des 31 pratiques prévues par la directive. La CJCE s'oppose donc à la réglementation Belge qui prohibe cette pratique indépendamment de toute vérification de leur caractère déloyal au regard des articles 5 et 9 de la directive, et ce même si cette réglementation prévoit des exceptions assouplissant cette prohibition. Elle considère que ces exceptions ne pouvaient se substituer à l'analyse qui doit être faite au regard des articles 5 à 9 (considérants 61 à 67).
La Cour de cassation vient, pour la première fois, de statuer sur cette question.
Elle indique que l'article L. 122-1 du code de la consommation qui interdit les telles offres conjointes sans tenir compte des circonstances spécifiques doit être appliqué dans le respect des critères énoncés par la directive.
Ainsi, le Juge devra rechercher si l'offre conjointe entre dans les prévisions des dispositions de la directive relative aux pratiques commerciales déloyales.
La solution au litige n'est pas définitive. Il s'agit plutôt d'un mode d'emploi à l'attention du juge, pour une question de fond relevant de sa souveraine appréciation.
Liens :
Cour de cassation - Première chambre civile - Arrêt de cassation n° 995 du 15 novembre 2010 (09-11.161)
Vu l'article L. 122-1 du code de la consommation , interprété à la lumière de la directive 2005/29/CE du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis à vis des consommateurs dans le marché intérieur ;
Attendu que M. X... a acheté le 6 décembre 2007 auprès de la société Lenovo un ordinateur portable équipé de logiciels préinstallés pour un prix de 597 euros ; que faisant valoir que le Contrat de licence d'utilisateur final ne permettait que le remboursement intégral de l'ordinateur équipé des logiciels qu'il ne souhaitait pas conserver, M. X... a fait assigner la société Lenovo en paiement de la somme de 404,81 euros au titre du remboursement du prix des logiciels ;
Attendu que pour débouter M. X... de sa demande, la juridiction de proximité retient que l'accord des parties s'est fait sur un type d'ordinateur complet et prêt à l'emploi et que le consommateur avait, l'acquisition effectuée, la possibilité de se faire rembourser les marchandises dans leur globalité ;
Attendu, cependant, que par arrêt du 23 avril 2009 (C-261/07 et C 299/07) , rendu sur renvoi préjudiciel, la Cour de justice des communautés européennes a dit pour droit que la Directive 2005/29/CE du 11mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis à vis des consommateurs, doit être interprétée en ce sens qu'elle s'oppose à une réglementation nationale qui, sauf certaines exceptions et sans tenir compte des circonstances spécifiques du cas d'espèce, interdit toute offre conjointe faite par un vendeur à un consommateur, de sorte que l'article L. 122-1 du code de la consommation qui interdit de telles offres conjointes sans tenir compte des circonstances spécifiques doit être appliqué dans le respect des critères énoncés par la directive ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans rechercher si la pratique commerciale dénoncée entrait dans les prévisions des dispositions de la directive relative aux pratiques commerciales déloyales, la juridiction de proximité n'a pas donné de base légale à sa décision...
Pour allez plus loin, vous pourrez consulter racketiciel.info , site « ayant pour objectif qu'en France, le consommateur ait le libre choix d'acheter ou non les logiciels proposés sur l'ordinateur par le constructeur ».
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