Nous vous donnons ici l'URL d'un arrêt fort intéressant de la Chambre criminelle de la Cour de cassation, qui statue pour la première fois sur cette question
On se souvient des deux enfants de huit et onze ans qui étaient menacés de fichage génétique après avoir volé dans un hypermarché deux tamagotchis et deux balles rebondissantes.
Le père avait annoncé qu’il s'opposerait au fichage génétique de ses enfants
Que risquaient-ils ?
A l’époque nous nous étions hasardé à dire que le père ne risquait rien.
L’article 706-56 II du Code de procédure pénale incrimine en effet le fait de refuser de se soumettre (personnellement) au prélèvement biologique et non de s’opposer au fichage de ses enfants.
La loi pénale étant d’interprétation stricte, nous pensions que l’infraction n’était pas constituée faute d’élément légal.
Si la mère et le père étaient d’accord pour refuser ce prélèvement, la question était de savoir si l’on pouvait se passer de leur autorisation.
Il aurait fallu pour cela qu’une juridiction désigne un administrateur ad hoc. Cela ne paraissait guère concevable dans la mesure les intérêts du mineur n’étaient pas en contradiction avec ceux de ses représentants légaux (condition imposée par l’article 388 - 2 du Code civil).
En poursuivant notre raisonnement, nous imaginions que les parents ou un hypothétique administrateur ad hoc soient d’accord, mais que les enfants refusent un tel prélèvement.
Notre avis était que l’enfant de huit ans ne risque absolument rien puisque la « majorité pénale » est maintenant fixée à 10 ans.
Son grand frère qui avait onze ans ne risquait pas l’année d'emprisonnement et les 15 000 € d'amende prévues par cet article 706-56 II.
En effet, l’article 2 de l’Ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante ne permet de prononcer qu’une « sanction éducative » à l'encontre des mineurs de dix à treize ans.
Cependant, en application de l’article 15-1 de cette ordonnance le tribunal pour enfants pourrait prononcer une mesure d'aide ou de réparation ; une obligation de suivre un stage de formation civique d’un mois ; une mesure de placement pour une même durée dans une institution permettant la mise en oeuvre d'un travail psychologique, éducatif et social ; l’exécution de travaux scolaires ; un avertissement solennel ou encore un placement dans un internat pour une année scolaire.
La Chambre criminelle de la Cour de cassation vient de statuer sur cette question.
L'arrêt en question sera sûrement abondamment commenté.
Dans cet arrêt de rejet n° 06-85.687 du 12 septembre 2007, elle indique que la mesure de protection judiciaire prononcée à l'égard d'un mineur par un tribunal pour enfants le ne constitue pas une condamnation pénale permettant, en application des dispositions de l'article 706-54, alinéa 1, du code de procédure pénale, l'inscription au fichier national automatisé des empreintes génétiques.
Extrait :
Le procureur général près la cour d'appel de Rennes contre l'arrêt de ladite cour d'appel, chambre spéciale des mineurs, en date du 12 mai 2006, qui a relaxé Alnoor X... du chef de refus de se soumettre à un prélèvement biologique ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 706-56 et R. 53-14 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, le 1er juin 2004, le procureur de la République de Nantes a requis un prélèvement biologique destiné à permettre l'identification de l'empreinte génétique d'Alnoor X..., mineur, déclaré coupable d'agressions sexuelles par jugement du tribunal pour enfants, en date du 4 mai 2004, qui a ordonné une mesure de protection judiciaire jusqu'à sa majorité ; que, les 4 février et 2 mai 2005, ce dernier a refusé de se soumettre au prélèvement ; qu'il a été poursuivi sur le fondement de l'article 706-56 du code de procédure pénale ;
Attendu que, pour infirmer le jugement et relaxer le prévenu, l'arrêt relève notamment que les dispositions de l'article R. 53-14 du code de procédure pénale sur lesquelles reposait l'obligation, pour Alnoor X..., de se soumettre au prélèvement de ses empreintes génétiques, sont illégales ;
Attendu que, si c'est à tort que la cour d'appel a ainsi statué, les dispositions réglementaires déclarées illégales ne pouvant avoir aucune incidence sur les éléments constitutifs du délit prévu par l'article 706-56 du code de procédure pénale, l'arrêt n'encourt pas pour autant la censure dès lors que la mesure de protection judiciaire prononcée à l'égard d'Alnoor X... par le tribunal pour enfants le 4 mai 2004 ne constitue pas une condamnation pénale permettant, en application des dispositions de l'article 706-54, alinéa 1, du code de procédure pénale, l'inscription au fichier national automatisé des empreintes génétiques...
Note : Nous ne savons pas si le prévenu était mineur au moment du refus de prélèvement.