Cass. com., 10 mai 2011 n°10-18.749, F-P + B, SAS Geneviève Lethu c/ Sté FV (JurisData n°2011-008328 ) : « Mais attendu que les dispositions de l'article 1900 du Code civil, qui offrent au juge la possibilité de fixer un terme pour la restitution d'un prêt, ne sont pas applicables au compte courant d'associé, dont la caractéristique essentielle, en l'absence de convention particulière ou statutaire le régissant, est d'être remboursable à tout moment ».
Par définition, le compte courant d'associé est un compte grâce auquel un associé consent à la société des avances ou des prêts.
Dans cet arrêt, la chambre commerciale de la Cour de cassation réitère le principe selon lequel le compte courant d'associé est remboursable à tout moment dès que l'associé en fait la demande sauf stipulations contraires pouvant notamment figurer dans les statuts ou dans la convention de compte courant conclue entre l'associé et la société.
En l'espèce, la SAS Geneviève Lethu qui avait refusé le remboursement immédiat du compte courant d'un associé, s'est vu ordonner, par la cour d'appel de Poitiers (1), de procéder à ce remboursement.
La Cour de cassation a confirmé cette décision en application d'une jurisprudence bien établie (2) qui considère qu'en l'absence de terme fixé au compte courant d'associé, il peut être remboursé à tout moment, indépendamment des éventuelles difficultés financières de la société.
Toutefois, il ressort de cet arrêt un apport nouveau en ce que la chambre commerciale de la Cour de cassation se prononce ici sur le fondement du droit commun du Code civil et plus particulièrement sur l'article 1900 (3) relatif au prêt de consommation et au simple prêt dont elle écarte l'application.
Face à cette décision, il est important de souligner qu'une attention particulière doit être portée à la rédaction des stipulations relatives au compte courant d'associé afin d'encadrer le remboursement de celui-ci. Ainsi, il pourra par exemple être stipulé que le solde du compte courant ne sera remboursé qu'à la condition que la trésorerie de la société le permette (4). Mais il est également possible de conclure avec l'associé une convention de blocage selon laquelle la société s'engage à ne pas rembourser le solde créditeur du compte courant avant le terme prévu et l'associé s'engage quant à lui à ne pas demander et à ne pas accepter ce remboursement.
Par ailleurs, et conformément à une jurisprudence antérieure (5), il semble que dans le cas où la société qui se voit être dans l'obligation de rembourser immédiatement le compte courant d'associé alors qu'elle rencontre des difficultés financières, celle-ci est en droit de demander au juge l'octroi de délais de paiement dans la limite de deux ans en application de l'article 1244-1 du Code civil (6).
1/ CA Poitiers 23 mars 2010, 2e ch. civ. 2/ Cass. com. 24/06/1997 n° 95-20.056, F-P+B, Sté Gamm c/Gambet : RJDA 11/97 n°1349 ; CA Versailles 2/04/1999, 3ème ch., Louis Dreyfus France c/ de Bois ès qual. ; Cass. com. 03/11/2004 n° 01-17.491, F-D Sté Constantin c/ C. : JurisData n°2004-025485 ; Cass. com. 8/12/2009 n° 08-16.418, F-D, J. c/ J. : RJDA 3/10 n°246 3/ Article 1900 du Code civil : « S'il n'a pas été fixé de terme pour la restitution, le juge peut accorder à l'emprunteur un délai suivant les circonstances ». 4/ Cass. com. 9-10-2007 n° 06-19.060 : RJDA 1/08 n°41 5/ CA Montpellier, 2ème ch., 16/12/2008 n° 07-7912, SARL Jacar c/ C. : Dr. sociétés 2009 comm. n° 87, note M.-L. Coquelet 6/ Article 1244-1 du Code civil : « Toutefois, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues. Par décision spéciale et motivée, le juge peut prescrire que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit qui ne peut être inférieur au taux légal ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital. En outre, il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement, par le débiteur, d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette. Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux dettes d'aliments ».