Les avocats peuvent exercer de nouvelles activités telles que celles d’avocat fiduciaire, d’avocat mandataire d’artistes et d’auteurs, d’avocat mandataire de sportifs ou encore d’avocat mandataire en transactions immobilières et plus récemment celle d’avocat chargé d’une enquête interne.
Les nouveaux métiers sont une opportunité de développement pour les avocats.
Cependant, l’avocat occupe ici un rôle nouveau qu’il s’agit d’encadrer.
L’activité d’avocat chargé d’une enquête interne peut s’exercer dans différents domaines comme le droit de la concurrence, le droit financier et boursier mais aussi celui de la corruption, du harcèlement moral et de la discrimination, tend aujourd’hui à se développer encore davantage avec l’arrivée de réglementations renforçant les obligations de compliance des entreprises telle la loi Sapin II du 9 décembre 2016.
Le 13 septembre 2016, sur un rapport de Jean-Pierre Grandjean, le conseil de l’Ordre des avocats de Paris a adopté des recommandations déontologiques pour encadrer l’activité d’avocat chargé d’une enquête interne ; ces recommandations ont été annexées au RIBP).
1) L’activité d'enquête interne menée par un avocat dans le cadre d’une mission d'assistance ou de conseil (article 2 annexe XXIV Vade-mecum de l’avocat chargé d’une enquête interne)
En 2011, la Commission de déontologie du Barreau de Paris avait considéré que l’activité d’avocat chargé d’une enquête interne s’inscrivait dans le cadre de l’article 6-2 alinéa 5 du RIN.
Il apparaît, à la lecture du rapport de Monsieur Grandjean, présenté au Conseil de l’ordre le 8 mars 2016, que l’acticité d’enquête interne menée par un avocat dans une mission d’assistance ou de conseil rentre dans le cadre de l’article 6-2 alinéa 2 du RIN aux termes duquel « l’avocat fournit à ses clients toute prestation de conseil et d’assistance ayant pour objet, à titre principal ou accessoire, la mise en œuvre des règles ou principes juridiques. »
Cette activité est de ce fait soumise au secret professionnel en vertu de l’article 66.5 de la loi du 31 décembre 1971.
L’avocat est donc tenu d’une part de mentionner aux personnes qu'il entend pendant l'enquête interne, qu'il n'est pas leur avocat mais qu'il agit pour le compte du client qui l'a missionné pour accomplir cette enquête et d’autre part d’informer les personnes auditionnées que le secret professionnel auquel il est tenu envers son client ne s'impose pas à celui-ci.
Le Conseil de l’ordre des avocats de Paris précise que l’avocat chargé d’une enquête interne aura la possibilité d’assister son client dans une procédure, amiable ou contentieuse, afférente ou consécutive à l'enquête interne, mais ne pourra représenter son client dans une procédure dirigée par celui-ci contre une personne qu'il aurait auditionnée pendant l'enquête interne.
2) L'activité d'enquête interne menée par un avocat dans le cadre d'une mission d'expertise (article 3 annexe XXIV Vade-mecum de l’avocat chargé d’une enquête interne)
A l’occasion d’une interview pour le magazine LJA en septembre 2016, Jean-Pierre Grandjean rappelait que « La qualification d’expert est permise lorsque l’avocat est saisi conjointement, par l’employeur et les représentants du personnel, en tant qu’expert indépendant dans le domaine des risques psycho-sociaux (RPS) »
Le rôle particulier de la mission d’expertise menée par l’avocat dans le cadre d’une enquête interne a soulevé de multiples interrogations et notamment celle du respect du secret professionnel.
Saisie en 2011 d’un dossier d’enquête interne en matière de harcèlement moral au sein d’une entreprise, la commission plénière de déontologie du Barreau de Paris, avait considéré que l’avocat était en charge d’une activité d’expertise de ce fait non soumise au secret professionnel (article 6.2 al 5 RIN).
Cependant, comme l’a rappelé le bâtonnier Frédéric Sicard dans une interview pour LJA magazine en août 2016, le secret professionnel n’est que partiellement annihilé « Un avocat peut remplir sa mission tout en respectant le secret professionnel : il peut, par exemple, expliquer qu’un salarié n’est pas apte, pour des raisons médicales, à occuper un poste donné sans dire de quel trouble il souffre ».
En outre, « si un avocat découvre incidemment une information sensible dans le cadre d’une enquête, il n’est pas tenu de la dévoiler si elle n’entre pas dans le périmètre fixé par la lettre de mission. »
Le Conseil de l’Ordre des avocats de Paris recommande toutefois à l'avocat chargé d'une enquête interne, dans le cadre d'une activité d'expertise, de refuser cette mission s'il est le conseil, habituel ou non, de la (ou des) personne(s) qui le missionne(nt).
Enfin, concernant la représentation, il doit être entendu que l’avocat ne pourra représenter une partie dans toute procédure, même amiable, afférente ou découlant de l'enquête interne.
3) Les recommandations générales (article 1 annexe XXIV Vade-mecum de l’avocat chargé d’une enquête interne du RIBP)
Le conseil de l’ordre des avocats de Paris a, rappelé dans le cadre de ses recommandations que l'avocat chargé d'une enquête interne se doit d'observer, en toutes circonstances, les principes essentiels de la profession (article 1.3 RIN).
Ceci implique que ce dernier devra notamment veiller à observer les principes essentiels de conscience, d'indépendance, d'humanité, de loyauté, de délicatesse, de modération, de compétence et de prudence.
Par ailleurs, le conseil de l’ordre des avocats de Paris rappelle également que l’avocat chargé d’une enquête interne a l’obligation de conclure avec son client ou les personnes qui le missionnent, une convention qui, outre les modalités de sa rémunération, définira l'objet de sa mission.
Enfin, l’avocat chargé d’une enquête interne préalablement à tout contact avec des tiers en vue de l’accomplissement de l’enquête devra leur préciser que leurs échanges ne sont pas couverts par le secret professionnel à leur égard et que leurs propos pourront être en tout ou partie retranscrits dans son rapport.
Frédéric Chhum
Avocat à la Cour
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