La Commission Européenne et particulièrement le commissaire chargé du marché intérieur et de l'application de la mise en oeuvre de la Directive Services, Monsieur BARNIER, viennent de lancer une nouvelle offensive vers les professions règlementées. Il s'agit toujours de mesurer les difficultés de la règlementation concernant l'accès aux professions règlementées.
La Commission prétend aider le consommateur à juger de la qualité du service en estimant qu'il existe toujours une asymétrie entre le consommateur et le « producteur » que serait l'avocat ou la profession règlementée. Cette asymétrie d'information empêcherait les consommateurs de faire le choix de prestataires de service en connaissance de cause.
La Commission Européenne n'a jamais relevé de défaillance du marché. Il s'agit « de prévenir le risque d'éventuelles défaillances du marché » !
Néanmoins, on estime qu'il faut évaluer l'ouverture de l'accès aux professions règlementées aux fins d'offrir aux consommateurs un choix plus large à un meilleur prix.
L'objectif de la Commission est très clair. Il s'agit d'éliminer les « rentes économiques pour les professionnels en place ». On ne veut plus limiter le nombre de professionnels habilités à fournir un service. On veut élargir le choix des consommateurs en allégeant la règlementation.
Décidemment, malgré la crise due à la dérégulation et les paroles réconfortantes de la Commission indiquant qu'elle ne recommencerait plus, les fonctionnaires de la Commission Européenne considèrent que seule la dérèglementation constitue une issue.
C'est toujours l'idéologie ultra-libérale qui prédomine à Bruxelles. On estime que l'augmentation du nombre de prestataires donc de la concurrence va baisser les prix et « pourrait aussi renforcer l'innovation ».
Naturellement, pour conforter cette idéologie, on se fonde sur des études d'économistes prétendant qu'il n'existerait aucune corrélation entre règlementation et qualité du service.
Parallèlement, la Commission - qui n'est pas à une contradiction possible - va militer, après que le Gouvernement français ait fait le forcing, pour exclure les notaires de la prochaine Directive qualification professionnelles permettant, par exemple, d'accéder à une profession, en tenant compte des stages.
Tout cela démontre qu'en fait, seul le lobbying compte et que tout le reste n'est que prétexte. La Commission Européenne veut une « transparence totale » alors même que dans le trilogue qui existe entre le Conseil Européen, le Parlement et la Commission, cette transparence n'existe pas. En bref, la transparence, c'est pour les autres...
La Commission va donc mener une évaluation mutuelle pour examiner la compatibilité de la règlementation avec le principe de non-discrimination (nationalité, lieu de résidence, ...), examiner si la règlementation est justifiée par une raison impérieuse d'intérêt général, examiner la proportionnalité des mesures nationales par rapport à leur aptitude à garantir la réalisation des objectifs qu'elles poursuivent. Cela va concerner les activités réservées. Il s'agira de réduire le champ des activités réservées en permettant à d'autres professions règlementées l'accès à certaines de ces activités ou en choisissant des approches moins restrictives.
Ainsi, à l'issue de cette évaluation, les Etats membres seraient invités à présenter les plans d'action nationaux avec quatre options proposées par la Commission :
- Maintenir la règlementation existante,
- Modifier la règlementation existante,
- Remplacer la forme actuelle de règlementation par un autre système permettant de garantir la qualité des services,
- Abroger la règlementation existante.
A aucun moment il n'est visé une quelconque concertation avec les professions ou une discussion. Cela semble en-dehors des méthodes de pensée et de travail de la Commission.
Michel BENICHOU